Sidra de la semaine
Chers amis de Kol Nidré,
Face au succès des dernières fêtes de Tichri, plusieurs membres nous ont demandé de parler plus régulièrement de l'association et des différentes actions que nous entreprenons tout au long de l'année.
Nous vous proposons de retrouver chaque semaine un mot de la sidra de la semaine par notre Hazan Benjamin Huglo.
Bonne lecture...
Hanouka et l'Effort 10/11/23
Chers tous,
En dépit des moments difficiles que nous vivons, nous vous espérons tous en bonne santé ainsi que vos proches.
Ci-dessous, vous retrouverez tout d'abord l'émission de notre Hazan au micro de Lise Gutmann consacrée à la symbolique de Hanouka et à la nécessaire résistance et résilience qui inspire cette fête.
Et ci-dessous, à la demande de plusieurs, vous retrouverez également l'intervention de Corinne Lepage lors de Neïla de Yom Kippour consacrée à l'effort.
Chabat chalom,
Le Conseil d'administration
L'EFFORT
Par Corinne Lepage, Ancien ministre
L’Effort est défini par le dictionnaire Robert comme l’activité d’un être conscient qui emploie ses forces pour vaincre une ou des résistances.
Kippour n’est-il pas par excellence le symbole de l’effort ? Effort physique d’abord pour résister à l’envie de se sustenter et passer une journée en prière. Mais surtout effort moral pour accepter, proposer s’attaquer à cette citadelle qu’est notre moi. Comme le disait Einstein « l’effort de rechercher la vérité doit précéder tous les autres efforts ».
C’est donc à la recherche de notre vérité que nous invite Kippour. Quelle en est la signification ?
Rechercher notre vérité, c’est accepter de se regarder soi-même, c’est-à-dire d’accepter de revoir ses actions et inactions, ses faiblesses et lâchetés, ses péchés sur le cours d’une année, autrement dit avouer et s’avouer ce que nous refusons souvent d’admettre, pour en mesurer la gravité, en rechercher l’origine pour tenter d’éviter de poursuivre ou de recommencer. Cet effort pour se regarder en face et demander le pardon – sachant que le mal commis envers les autres ne peut être pardonné que par ceux-là même auxquels le mal a été fait – est considérable.La prière partagée en commun, le Ovinou Malkenou prononcé à plusieurs reprises nous y appelle et nous y aide.
Mais en réalité, cet effort est multiforme et dépasse la seule journée Kippour.
Il est multiforme car il implique d’abord une rupture avec la situation de confort qui est celle de l’habitude, de la vie quotidienne, d’une certaine bienveillance que l’on finit par avoir à l’égard de soi-même. Il nous appelle un changement de nature et non de degré par rapport au reste du temps. La recherche d’une purification par une mise à disposition de tout notre être au service d’un examen de conscience sans aucune aménité car elle conditionne notre pardon et notre inscription dans le livre de la vie. La gravité du service du souvenir ou Yiskor, qui nous relie à tous ceux que nous avons aimés, auxquels nous devons souvent ce que nous sommes et ce que nous avons pu faire dans la vie, nous invite précisément, au-delà du souvenir qui permet de les faire vivre, à mesurer nos comportements au regard de l’héritage qu’ils nous ont laissé. Cette opération souvent douloureuse de purification qui conduit en réalité à essayer de nous séparer d’une partie de nous-mêmes, car nous sommes responsables de nos actions et de nos fautes, exige une forme de courage et de détermination.
Mais au-delà, on ne peut que s’interroger sur cla signification de cet effort s’il était unique, quasiment inutile une fois le repas de sortie du jeune englouti.
Certes, le respect de nos 613 mitzvot, soit 365 prescriptions négatives et 248 positives qui encadrent la vie de tout juif, excluent a priori tout risque de cette nature. Mais à la vérité combien sommes-nous dans cette salle et bien au-delà à les respecter, voire même à respecter les fondements mêmes de ce que nous sommes à savoir les 10 paroles ?
L’effort éthique devrait être une donnée permanente.
Mais, la société contemporaine est bien loin de l’affirmation de François Mauriac pour lequel notre vie ne vaut que ce qu’elle a coûté d’effort. La loi du moindre effort apparaît être une donnée contemporaine incontournable, au moins dans les sociétés occidentales, et de manière générale le matérialisme et l’égoïsme sont devenus les valeurs dominantes et gagnantes. La valeur travail – l’effort mis en application – perd constamment du terrain.
Cette caractéristique du monde contemporain s’accompagne d’une deuxième donnée croissante, celle du déni de réalité et de la montée en puissance des vérités alternatives. Celles-ci deviennent précisément la justification du laisser-faire, d’ une forme d’indifférence à la détresse et au malheur des autres, de la capacité de céder à la facilité. Cette évolution est catastrophique un moment où au contraire nous devrions trouver dans nos textes d’une richesse incalculable les fondements de la volonté pour changer de paradigme éviter de rendre notre monde invivable dans tous les sens du terme.
Or, il nous revient en tant que juifs, héritiers d’une tradition de réflexion, de courage, de persévérance, de ténacité qui nous a permis de survivre, d’inventer, d’apporter au monde, de maintenir des valeurs qui sont celles de la dignité de notre humanité, de promouvoir l’effort. L’effort de sauvegarder les bases éthiques qui nous rassemblent aujourd’hui dans cette journée de Yom Kippour, de rappeler le sens fondamental de la vie, d’être en capacité parce que nous avons des racines et savons d’où nous venons, de contribuer à changer le monde. Car nous ne devons jamais oublier, comme le rappelait le Professeur Steiner que nous sommes les invités de la vie et que nous vous devons laisser la maison plus belle en sortant que nous l’avons trouvée en en entrant.
Kippour quoi ?
A l’heure où sonne la cloche de la rentrée, où l’appel du quotidien recommence après la pause estivale, voilà que sonne le rappel des fêtes de Tichri. Pourtant, avant de plonger dans le tourbillon du quotidien, faut-il pour autant plonger dans celui des fêtes sans s’interroger au préalable ?
La force de l’habitude peut se transformer en soulagement facile lorsque les « convocations d’automne » se limitent aux retrouvailles d’avec Esther et Jeremy pour évoquer ce qui s’est passé l’été dernier…
Notre âme, notre élévation morale et spirituelle n’y mérite-t-elle pas davantage ?
Si l’importance de la prière en commun est centrale à Kippour, s’il est un temps où il n’est pas plus important que toute la communauté soit réunie, sans distinction aucune, encore faut-il que l’intention individuelle et collective soit au rendez-vous.
A l’heure où la religion devient un produit marketing, notre responsabilité commune et individuelle n’a jamais été aussi importante.
Il convient en effet de nous interroger quant à la force de nos habitudes et surtout à son instrumentalisation pour savoir si l’intention est bien là.
Demandons-nous : que voulons-nous transmettre du judaïsme en général et de Yom Kippour en particulier à nos enfants ?
Quel Yom Kippour souhaitons nous vivre cette année ?
Faisons que l’année qui s’ouvre soit non seulement une année où les bénédictions puissent se renouveler pour nous et nos proches mais également une année d’envol moral et spirituel où nous ne laissons pas, avant d’aborder les fêtes de Tichri, la force de l’habitude et le « merchandising » prendre le pas sur nos vies.
Pour ce faire, rien de tel que de se questionner quant à notre place, notre rôle et la direction que nous souhaitons imprimer au regard tant de l’année passée que de l’année qui vient.
Puissent les fêtes à venir être l’occasion de favoriser ce questionnement et de partager collectivement et individuellement le sens profond du judaïsme, à savoir : que puis-je faire pour rendre pour moi et autour de moi la vie plus haute et plus belle ?
Chana Tova à tous
Musique liturgique, tradition et spiritualité 20/07/2023
On trouve de multiples traces dans la Torah de l’emploi d’instruments de musique ainsi que du chant notamment choral dans le service sacré.
On se rappellera ainsi que David jouait du Kinnor (sorte de lyre) pour sortir le roi Saül de sa mélancolie (1, S 16,23) et qu’il est également à l’origine de la musique liturgique en vigueur au temple, ayant créé vingt-quatre chœurs composés de douze chanteurs dirigés chacun par des Hazanim (1, Ch.25). On évoque également la présence de la Magréfah au temple (sorte d’orgue hydraulique).
La présence d’une musique liturgique pour orgue et chœur est donc très ancienne.
Le rôle et l’importance de la liturgie fait donc partie de l’histoire commune du judaïsme alors qu’aujourd’hui cette singularité juive semble mise de côté.
Rappelons également que la mise par écrit de la musique liturgique juive - intervenue en Europe au milieu et à la fin du XIXe siècle - avait pour but premier d’assurer la diffusion d’un patrimoine qu’une seule transmission orale mettait en danger. Les compositeurs juifs avaient alors pour ambition première non pas de composer des mélodies nouvelles mais d’assurer la transmission de la tradition qu’ils avaient eux-mêmes reçue. Le but ultime étant de façonner un rite unique : le rite "français".
La question est : pourquoi est-il fait si peu de cas aujourd’hui de cette tradition musicale et de ce patrimoine ?
Deux tendances distinctes peuvent être observées.
La première provient de la montée en puissance de l’orthodoxie qui ne tolère pas ou plus l’usage d’instruments de musique pendant le chabat et les fêtes et encore moins l’usage de chœurs mixtes. Celle ci pratique même aujourd’hui une sorte de réécriture de l’histoire au point de nier l’existence de chœurs mixtes accompagnant le Hazan avec l’orgue dans bon nombre de synagogues consistoriales jusqu’à la fin des années 1960, début des années 1970.
La seconde provient de la transformation de communautés modernes, à l'origine traditionnelles, ayant aujourd'hui fait le choix d'une modernité au final exclusive puisque les conduisant à couper tout lien avec le passé pour se "réinventer".
Ces deux tendances distinctes mais finalement convergentes conduisent à mettre de côté un pan entier du patrimoine juif.
En effet : la musique liturgique est un vecteur essentiel de tradition et de sacré. Elle est en outre résolument ancrée dans la modernité. Elle est tout d'abord pédagogique parce qu'elle permet au fidèle de placer ce que l'on nomme les répons liturgiques (Amen / Barour hou ou barour chémo). Ensuite, en participant et en structurant le rituel, elle permet au sacré de s’exprimer. La musique liturgique permet ainsi l'élévation des âmes.
Reprise de générations en générations elle participe indéniablement à la diffusion et à la transmission du judaïsme.
Telle est la raison d'être de Kol Nidré : contribuer à la diffusion de ce patrimoine hors du commun en accueillant toutes les personnes qui se retrouvent dans cette belle tradition, quel que soit leur parcours.
Nous avons entrepris une tâche considérable qui s'entend mais ne se voit pas directement : la remise en forme de l'ensemble des partitions incluant la reprise intégrale des translittérations et donc la mise en musique d'une tradition orale par la notation musicale.
Au-delà de notre dimension communautaire, nous développons une mission culturelle puisque nous pu nous produire devant plus de 1000 personnes au cours de quatre concerts exceptionnels à l'Institut national des jeunes aveugles, programme reprenant par ailleurs à l'automne prochain.
Vous retrouverez sur la page “Grands airs de la liturgie Juive française” la présentation détaillée d'airs bien connus, leurs origines et leur signification, vous permettant ainsi de vous immerger dans cette tradition au cœur de l'été et ainsi rafraîchir vos esprits !
Chabat chalom !
Kol Nidré : à la découverte de notre (re) naissance morale et spirituelle 11/07/2023
Nous abordons avec le jeûne du 17 tamouz la période des trois semaines ou Yeme beyn hametzarim ("les jours entre la détresse") qui s'écoule jusqu'au 9 av, commémorant à la fois la destruction du temple (le 17 tamouz marquant la première brèche dans l'enceinte de Jérusalem et le 9 av la destruction du temple) mais également les périodes de délitement de la foi juive (péché du veau d'or, érection d'une idole dans le second temple, interruption du service des offrandes au temple, crémation d'un rouleau de la torah par Apostamos).
Dans un article tout à fait remarquable, le rabbin Jonathan Sacks (z''l) nous explique comment le peuple juif a inventé l'espoir, c'est à dire en faisant de Dieu le signe d'une Histoire (avec un H majuscule) où l'espoir est une force motrice (https://www.myjewishlearning.com/article/how-the-jewish-people-invented-hope/).
Or, le rôle de l'histoire est précisément de nous transmettre des enseignements du passé afin d'en tirer les conséquences pour le présent dans le but, autant que faire se peut, de ne pas commettre ces mêmes erreurs dans le futur. Ainsi, selon la formule de Winston Churchill : « Un peuple qui oublie son passé se condamne à le revivre. Agissez comme s'il était impossible d'échouer. Le courage, c'est ce qu'il faut pour se lever et parler, le courage est aussi ce qu'il faut pour s'asseoir et écouter ».
Voilà cinq ans, la communauté Kol Nidré était créée pour faire perdurer une tradition liturgique qui nous unit mais qui est aujourd'hui plus que jamais menacée, à raison notamment de la disparition de la formation des ministres-officiants (Hazanim) du rite "français".
En cette période spécifique des trois semaines et plus généralement dans les temps troublés que nous vivons où beaucoup de personnes se trouvent déracinées, en quête de sens, nous avons la chance de disposer d'une religion et d'une pratique nous rattachant directement à une tradition vivante. Les offices que nous partageons à l'Association Kol Nidré nous permettent non seulement de nous ressourcer en retrouvant le sens de la prière mais également de prendre de la hauteur par rapport à la violence du monde dans lequel nous vivons, ceci pour nous permettre de mieux nous y adapter.
Nous ne croyons pas que la modernité consiste à détruire les patrimoines - quel qu'ils soient - qui nous ont été légués par le labeur des générations précédentes mais au contraire à les valoriser, les enrichir et le cas échéant trouver les adaptations permettant que toutes les générations puissent se retrouver et que le passé et l'avenir puissent continuer à se trouver reliés dans le faisceau des Vivants.
Ces valeurs sont à la base de notre communauté.
En choisissant Kol Nidré, vous faites le choix de la continuité et de la transmission : celui de partager collectivement un héritage moral et spirituel, garantissant ainsi à vous-même et vos enfants la transmission de ce que vous avez reçu, dans le respect du judaïsme.
En participant à nos offices de Tichri, vous pourrez ainsi prier avec kavannah, rassemblés et réunis dans une atmosphère chaleureuse et sereine de prière, en famille, dans la fidélité par rapport aux valeurs qui vous animent et qui nous unissent.
Par ailleurs, notre communauté évolue depuis cinq ans : au-delà des offices publics que nous organisons, notre nouveau Sidour constitue notre support d'apprentissage des prières et nous sommes heureux de former de nombreux enfants en organisant, le cas échéant, bar et bat mistva.
Votre communauté se tient évidemment à votre disposition tout au long de l’année pour vous assister dans tous les moments de la vie juive, pour célébrer vos joies comme pour vous accompagner dans la peine.
N’hésitez pas à nous solliciter : nous sommes là pour vous.
Nous vous retrouverons tout au long de l'été pour partager avec vous le sens des prières que nous récitons au travers des airs que vous reconnaîtrez sans doute mais que nous souhaitons vous faire redécouvrir. Vous retrouverez également des témoignages de fidèles qui vous raconteront outre leur parcours personnel les raisons pour lesquelles ils adhèrent à la communauté de Kol Nidré.
Paracha Akharé Mot - Kedoshim 29/04/2023
La double Sidra de ce chabat (puisque nous lisons deux sidrot qui sont liées) est certainement l’un des monuments de la Torah, si tant est que l’on puisse donner une valeur différente aux différentes sections que nous lisons (ce qui n’est pas le cas).
Nous lisons en effet plusieurs sections de la Sidra Akaharé Mot le jour de Yom Kippour.
Akharé Mot signifie « après la mort » puisque cette Sidra débute par le récit de la mort des fils d’Aaron qui se sont « trop approchés » devant l’Eternel et avaient péri.
L’Eternel s’adresse aussitôt à Moïse afin qu’il indique à son frère Aaron qu’il ne saurait entrer dans le sanctuaire selon son bon vouloir mais seulement au moment propice.
La Sidra Kedoshim est considérée par la tradition juive comme renfermant l’essentiel de la Torah puisqu’elle contient 53 mitsvot.
Elle commence par ces versets
« Vous serez saints car Je suis saint, Moi le seigneur votre Dieu » (Lev. ch. 19 v. 2).
D’aucuns pourraient penser que le peuple juif serait ipso facto saint, c’est-à-dire que l’Eternel aurait décidé que par nature, le peuple juif est un peuple saint.
Une telle interprétation nous conduirait à considérer in fine que le peuple juif serait alors délié de toute responsabilité, lui conférant ainsi une assurance divine d’être toujours « sûr de lui-même » (pour reprendre une formule bien connue).
Or, on relèvera tout d’abord que le verset en question est rédigé au futur, signifiant bien évidemment que rien n’est écrit à l’avance.
La question de nos orientations, de nos obligations, de nos engagements ou – en d’autres termes – de nos choix de vie n’est nullement figée.
Transformer et tordre le concept de sainteté en quelque chose de naturel et d’inné n’a pour seul effet que de transformer la croyance en idolâtrie et, par la même occasion, la religion en superstition.
Précisément, le fait que ces deux Sidrot soient liées permet de garantir l’équilibre entre la mission de sainteté dévolue au peuple juif, objectif particulièrement éminent, et la nécessaire responsabilité qui en est le corollaire nécessaire et indispensable.
Afin de ne point nous brûler les ailes comme les fils d’Aaron qui se sont présentés devant Dieu selon leur bon vouloir et sans y être invités, nous devons garder la plus grande humilité dans la tâche essentielle qui nous est dévolue d’être un peuple saint : ce que nous ne sommes pas.
Même si nous pouvons l’être, en devenir, par nos actions et celles de nos enfants. C’est tout l’essentiel de la notion phare du judaïsme de Tikoun Olam ou réparation du monde :
nous devons nous efforcer de manière tant individuelle que collective d’améliorer voire de réparer le monde dans lequel nous vivons.
Vaste programme…
Chabat Chalom – Hazan Benjamin Huglo
Paracha Tsav – Chabat Hagadol 31/03/2023
Ce Chabat qui précède la fête de Pessah est dénommé « Chabat Hagadol » ou Grand Chabat à raison notamment d’un mot de la Haftara lue ce chabat tirée de Malachie (ch.3 v. 23).
« Or je vous enverrai Elie, le prophète avant qu’arrive le jour de l’Eternel jour grand et redoutable ».
Ce chabat est donc considéré comme « grand » parce qu’il porte précisément sur des promesses d’avenir, celle des temps messianiques.
Or, selon la formule de Victor Hugo si l’avenir est une porte, le passé en est la clef.
Cette Sidra concerne comme la précédente les sacrifices.
Un passage attire toutefois l’attention, celui concernant la fonction de prêtre ou Cohen qui est attribué à Aaron et ses fils :« Va prendre Aaron et ses fils avec lui (…) » (Lev. ch. 8, v.2).
Pourquoi la référence aux fils ?
Dans le judaïsme, nous savons que la transmission de la Torah n’est pas héréditaire.
Comme nous l’avons dit dans notre commentaire de la semaine dernière, dans le chéma les verbes sont au pluriel : c’est à chaque génération de se l’approprier et de l’étudier.
Ainsi, les enfants de Moïse furent des juifs comme les autres sans distinction et les enfants du grand-prêtre Elie n’ont non seulement pas hérité de la fonction mais la tradition nous enseigne qu’ils se sont éloignés du droit chemin et ont été disqualifiés.
Quant à ceux du prophète Samuel, ils n’ont hérité ni du don de prophétie ni des qualités de dirigeant de leur père.
Pour le dire autrement, tous les mérites de nos ancêtres ne se transmettent pas en héritage quand bien-même si, notamment à Yom Kippour, nous sommes toujours prompt à invoquer la fidélité de nos parents dans l’alliance avec l’Eternel.
Il n’y a donc qu’une exception : la prêtrise conférée à Aaaron et ses descendants.
C’est la raison pour laquelle encore aujourd’hui de nombreux juifs se rattachent à cette origine et se revendiquent Cohen.
Or, il est dit également dans la Torah que l’Eternel fera d’Israël un peuple de Cohen (Exode, ch. 19, v.6), signifiant par la même l’ambition que tous les enfants d’Israël deviennent un peuple entièrement tourné vers le service divin et permettant, par la même occasion, d’être une source de bénédiction.
Il s’agit là assurément d’une haute ambition et ô combien difficile vers laquelle nous devons tendre chacun à notre niveau par nos actions personnelles, impliquant de surmonter notre nature et sa réalité. Ce n’est donc pas un hasard si le Shoukhane Aroukh* commence par le mot itgaber, c’est-à-dire « surmonter ».
Chabat Chalom – Hazan Benjamin Huglo
* « La table dressée », compilation du Rabbin Josef Karo datant du XVIe siècle reprenant les lois inhérentes aux grands domaines de la vie juive (vie quotidienne, services religieux, vie conjugale et droit civil)
Roch Khodesh Nissan – Chabat Vayikra 24/03/2023
Ce chabbat est tout d’abord le premier du mois de Nissan qui verra bientôt venir les célébrations des fêtes de Pessah, marquant l’anniversaire de la naissance d’Israël en tant que peuple.
Nous démarrons également la lecture d’un nouveau livre de la Torah qui traite largement du rôle des lévites et des sacrifices : le Lévitique ou « Vayikra », c’est-à-dire « Il appela ». C’est également le nom de la Sidra de la semaine.
Or, cette Sidra débute d’une manière spécifique puisque l’Eternel s’adresse à Moïse en ces termes : « Il appela Moïse et lui parla de la Tente d’assignation en disant : Parle aux enfants d’Israël et dis leur… » (Lev. 1.1). Une telle adresse est étonnante dès lors que le texte nous indique plutôt d’habitude « ll parla à Moïse en disant ».
La tradition juive nous enseigne en effet que la voix de Dieu était certes audible à Moïse en toutes circonstances mais n’était audible aux enfants d’Israël que dans la Tente d’assignation, signifiant ainsi que nul ne l’entend hormis s’il se trouve dans la Tente d’assignation et rencontre Dieu.
Que faut-il en déduire ?
Pour entendre la voix, c’est-à-dire entendre l’appel, il faut se placer soi-même dans une position de réception, c’est-à-dire accepter la Torah et les commandements qui en découlent. Or, être dans la foi – la confiance en hébreu – implique précisément une démarche volontariste de tout un chacun : cette confiance ne peut venir de l’extérieur ni de Dieu lui-même mais bien de notre for intérieur.
De la même manière que les enfants d’Israël entendaient la voix s’ils entraient dans la Tente d’assignation, il ne nous est permis d’entendre cette voix qui si nous décidons nous-mêmes, à notre tour, d’y entrer.
On ajoutera que chaque génération doit à son tour faire ce choix : lorsque nous récitons les prières du chéma, tous les verbes sont au futur, impliquant que tout reste à faire et que rien n’est figé dans le temps ou l’espace.
Le reste est une question de choix.
Chabat Chalom vé Khodesh Tov – Hazan Benjamin Huglo